La permaculture, une solution permanente ?

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Une solution permanente…

 

Dans notre dernier article, nous vous expliquions ce qu’est la permaculture et les effets positifs de ce système agricole. L’application de ce modèle dans un milieu agricole a pour principal avantage de préserver la terre et la vie qu’elle contient. De plus en plus, les nouvelles générations se sentent concernées par les problèmes environnementaux. Elles ont conscience que respecter l’environnement est essentiel. La permaculture apporte une solution à ceux qui souhaitent développer une agriculture à la fois rentable et durable.

 

Au cœur de la permaculture, on retrouve l’idée de collectivité comme pratique et valeur culturelle, le principe étant de donner la priorité au groupe plutôt qu’à l’individu. Si ce sujet vous intéresse, nous vous conseillons de lire le travail de Slovoj Zizek, éco-marxiste radical et l’un des meilleurs académiciens de notre époque. Vous pouvez également lire notre dernier article qui définit la permaculture.

Dans cet article nous avons choisi de vous présenter quatre exemples de permaculture réussie à travers le monde. La permaculture permet de transformer n’importe quelle ferme, quelle que soit sa taille, en système agricole responsable, durable socialement et environnementalement. Le principe est de construire sur la base de ce qui existe déjà, afin de lutter contre le gaspillage, un des fléaux de notre société, qui résulte d’un capitalisme agressif, qui érige le profit en fin plutôt qu’en moyen, et non respectueux de l’environnement.

Les quatre fermes biologiques que nous allons vous présenter se sont développées suivant ce mouvement écologique avant-gardiste. Leur objectif est de s’éloigner du modèle de profit classique fondé sur le “tout jetable”. Tout d’abord nous irons au Bec Hellouin, où est installée une des fermes de permaculture la plus dynamique de France, puis à Brachoua au Maroc, où l’exploitation permet à un village entier de vivre. Nous prendrons ensuite le chemin du Bénin, vers la ferme de Songhai, qui emploie des centaines de personnes à travers l’Afrique, et nous terminerons notre voyage au nord de la Thaïlande, à Sahainan. A travers ces différents exemples nous montrerons que les bénéfices apportés par la permaculture sont infinis.

 

BEC HELLOUIN, FRANCE

Cette ferme est un très bon exemple des avantages significatifs de la combinaison de l’enseignement théorique et de la pratique, pour améliorer notre système agricole et notre empreinte sur l’environnement. La particularité de cette ferme est qu’elle est liée à une école dans laquelle elle transmet ces valeurs. En 2004, Perrine et Charles Hervé-Gruyer décident d’abandonner leur travail (respectivement juriste en entreprise et marin) pour se consacrer au travail de la terre. Partant du principe que tout vient de la terre, ils ont décidé de synthétiser différents types de culture pour protéger et améliorer leur environnement.

C’est pourquoi en 2007, ils ont choisi de se lancer dans la permaculture pour une activité durable. Depuis, ils s’améliorent sans cesse grâce à de nouvelles méthodes et de nouveaux outils qu’ils développent. Aujourd’hui la ferme est auto-suffisante, et ils peuvent vivre comme de vrais fermiers. Lorsqu’ils ont démarré leur activité, le sol n’avait que 20cm d’épaisseur, et aucun agriculteur n’avait réussi à cultiver la terre avant. Grâce à l’utilisation des techniques de la permaculture, ils ont créé un sol riche, qui se développe continuellement grâce aux nutriments et à la biomasse, qui se prêtent à la croissance de produits biologiques de qualité, favorables pour l’environnement et pour nous.

L’un de leur projet les plus intéressants et réussi, est leur foret comestible dans laquelle, comme son nom l’indique, chaque plante se mange. Cet écosystème naturel produit deux fois plus de biomasse par hectare qu’un système agricole traditionnel, sans utiliser aucun engrais, arrosage, ou intervention humaine. Ceci est une preuve que l’agriculture peut être rentable et avoir un impact positif sur l’environnement, même s’il est compliqué d’étendre le système à l’ensemble des exploitations agricoles.

 

BRACHOUA, MAROC

Brachoua est un petit village non loin de Rabat, au Maroc. Ce village était très pauvre, sans emploi pour les femmes, et avec des petits travaux par ci par là pour les hommes et les enfants. Il n’y avait pas d’électricité, ni d’eau potable, ni de jardins. Cependant, au cours des quatre dernières années, l’association Ibn al-Baytar a aidé à créer et développer des potagers pour les soixante familles, appliquant les principes de la permaculture au profit du village. Aujourd’hui, les villageois sont autosuffisants, chaque famille a quotidiennement des légumes, des fruits et de la viande pour se nourrir. Ils entretiennent leurs multiples jardins potagers et fruitiers, nourrissent chaque habitant du village, puis vendent le surplus à Rabat. C’est un mouvement qui revient en arrière dans le temps, à l’époque où le commerce des biens était à l’ordre du jour. Il fournit une preuve directe et tangible, qu’au niveau local, l’idée d’un abandon du consumérisme, en faveur d’une société qui consomme de façon modérée, éco-responsable et local fonctionne. L’évolution du village a été incroyable. En effet, ils ont aujourd’hui de l’eau potable, des puits pour arroser les plantes, leurs propres sources d’électricité, de l’eau potable, et une augmentation du niveau de vie.

Dans le projet, l’accent est mis sur la participation active des femmes, pour leur permettre elle aussi de s’émanciper dans leur travail. Elles gèrent la coopérative et organisent la vente de leurs produits, ce qui leur permet d’avoir des revenus supérieurs à la moyenne des femmes au Maroc. Ils démontrent à travers cette communauté inclusive que le succès ne dépend pas de l’arrangement des chromosomes dans le corps humain, mais plutôt de l’utilisation des compétences de chaque membre de la communauté pour réussir. L’expression « plus on est nombreux, moins le travail est dur » résume assez bien leur manière de fonctionner.

Pour avoir des revenus supplémentaires, ils ont également créé une structure d’écotourisme. Les citadins peuvent venir habiter dans le village en weekend ou en vacances, aider dans les jardins et profiter des produits bio du village. En fait, la création de cette coopérative a été et continue d’être une belle réussite. Les familles ont plus d’argent, elles peuvent ainsi payer les études de leurs enfants. En plus de cela, un lien social fort s’est créé entre et dans les familles. En effet, le mode de fonctionnement permet aux parents d’avoir plus de temps libre à passer avec leurs enfants. Les familles sont plus proches qu’avant car elles travaillent et vivent ensemble. Pour ces personnes, la permaculture, à savoir l’application d’une agriculture socialement et écologiquement responsable et durable, a créé une nette amélioration des conditions de vie, du partage des richesses et de la solidarité. Cet exemple pourrait être une inspiration pour bon nombre de nos pays, villes, ou villages, où l’individualisme est une réalité.

 

SONGHAI, BENIN

Dans les années 1980, Godfrey Nzamujo, chercheur dans un laboratoire réputé de Californie, a regardé la situation économique, sociale et environnementale de l’Afrique, plus particulièrement celle du Bénin (pays d’origine de sa famille), et y a vu des opportunités incroyables. Il est parti du paradoxe que ce continent est le plus riche du monde en termes de ressources naturelles, mais que malgré cela, sa population est la plus pauvre du monde.  Il décida donc de retourner dans son pays d’origine pour contribuer au développement durable de son pays. Ainsi, en 1985, l’Etat béninois lui donne 1 Ha pour lancer une ferme biologique. Aujourd’hui, cette culture s’étend sur 24 hectares et il a ouvert plus de quinze autres fermes au Bénin et dans d’autres pays de la région. Sa devise : « rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme ». C’est encore un excellent exemple de l’alternative proposée par la permaculture.  C’est une volonté et un besoin de nous éloigner de nos sociétés gaspilleuses, pour se tourner vers des solutions durables qui respectent notre planète.

En effet, chaque animal, légume, fruit ou déchet a de multiples rôles à jouer dans ces exploitations. Par exemple, les fientes de poules sont utilisées pour produire du biogaz naturel, et lorsque le gaz a été extrait, le résidu est utilisé comme compost pour les plantes. Le gaz est ensuite utilisé pour produire de l’électricité pour la ferme. Une autre innovation de récupération durable utilisée, est la fonte de chaque morceau de métal cassé ou usé pour créer leurs propres pièces de rechange, de sorte qu’ils n’aient pas à les importer.

Godfrey Nzamujo n’utilise pas directement le terme de permaculture pour parler du fonctionnement de sa ferme, mais cela repose sur les mêmes principes : utiliser ce que la terre nous donne pour l’améliorer.

L’impact positif que cela a eu dans cette région est frappant : des centaines d’emplois créés, et un accès universel à des produits frais de qualité aux habitants des alentours. Il démontre directement la capacité d’une exploitation agricole à être prospère et rentable, tout en respectant l’écosystème et les êtres vivants qui s’y trouvent. Tout comme notre exemple précédent, il a également créé une université, où il peut enseigner à la jeune génération comment fonctionne ce modèle, afin qu’ils puissent lancer leurs propres fermes biologiques.

C’est une véritable réussite car M. Nzamujo est parti de zéro, mais a tout transformé : de nouvelles méthodes de culture durables optimisées, la récupération et la valorisation des déchets, et une redistribution égalitaire pour donner accès aux plus pauvres à des produits de qualité. Ainsi, comme dans le troisième principe de la permaculture, il redistribue les surplus pour en faire bénéficier le plus de monde possible, en créant de nouvelles structures par exemple.

 

SAHAINAN, THAÏLANDE

Cette ferme a été créée par le peuple Lua, une tribu locale qui, après avoir été persécutée pendant des générations, s’est vue offerte par le gouvernement thaïlandais des terres dans le nord du pays. Ils ont alors décidé d’utiliser des techniques ancestrales pour cultiver cette terre, afin de retrouver l’harmonie avec la nature que leurs ancêtres avaient construits des siècles auparavant. Cette terre dont ils ont hérité avait été ravagée par un système de monoculture intensif. Le retour aux sources, et l’application des techniques ancestrales a permis de rendre la terre de nouveau prospère et fertile. Bien que ces principes diffèrent légèrement de ceux proposés par la permaculture traditionnelle, l’idée reste la même : une volonté d’évoluer vers une agriculture socialement responsable.

Avec trois hectares de terres, la plus grande partie de leur production est faite dans la forêt comestible. C’est le même concept que celui de la ferme du Bec Hellouin. La forêt offre une protection, une abondance d’eau, et une biomasse très riche, ce que les fermiers utilisent pour faire pousser leurs produits. Encore une fois, c’est l’optimisation des écosystèmes qui se solde par une productivité élevée. Ils cultivent donc une grande quantité de légumes et de fruits dans cette forêt. Leur productivité est très élevée car le sol est très riche, avec des milliers d’espèces différentes qui se nourrissent et créent de la biomasse simultanément. De plus, les grands arbres de la forêt réduisent le risque de dégâts dus aux tempêtes par exemple. En continuant à détruire nos ressources naturelles avec une agriculture intensive utilisant des pesticides ou des engrais, nous rendons notre sol de moins en moins riche, et donc de moins en moins fertile. L’objectif est d’utiliser l’hyper-richesse de la biomasse forestière pour nourrir et cultiver des fruits et légumes.

 


 

Ces exemples nous montrent que ce concept d’agriculture durable ne se contente pas de prendre de l’ampleur, mais fournit une solution sérieuse et tangible à bon nombre de nos problèmes. La permaculture améliore la santé de notre planète et la vie de ceux qui y vivent, elle renforce les communautés, l’égalité et crée des citoyens soucieux de l’environnement qui ensemble peuvent travailler pour un monde meilleur avant qu’il ne soit trop tard.

Malgré l’aspect ultra positif et prometteur d’un tel type de culture, la conversion se fera au fur et à mesure des années. En effet, les agriculteurs qui cultivent nos matières premières alimentaires (blé, colza, maïs, etc…) doivent répondre à des logiques industrielles, pour que nous puissions consommer nos produits transformés. De plus, l’ensemble de la société est dans une logique de baisse des coûts, non pas dans une amélioration de la qualité. Pour autant, de plus en plus de personnes sont concernées par ces problématiques. C’est pourquoi le concept d’économie locale et circulaire se développe de plus en plus. En effet, l’établissement complet d’une agriculture durable et dans le respect de l’environnement ne pourra se faire sans une consommation locale, avec des circuits de distribution locaux, qui n’ont pas pour but de réduire le plus possible le coût des produits qui viennent de la terre.

Ainsi, il semble que la transition de notre système actuel vers une société plus respectueuse et durable se fera sur des dizaines d’années, voire des siècles. Dans la mesure où se tourner vers un nouveau mode de vie peut souvent être synonyme de mise à l’écart, la conversion à grande échelle s’effectuera le jour où elle sera inclusive.

SOURCES:

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